Abonnement

The Point Newsletter

    Sed ut perspiciatis unde omnis iste natus error.

    Follow Point

    Commencez à taper votre recherche ci-dessus et appuyez sur Entrée pour rechercher. Appuyez sur Échap pour annuler.

    Photoweb s’associe à Kyocera pour passer un cap

    Entreprise française pionnière de l’impression photo en ligne, Photoweb (36,5 M€ de CA, 220 collaborateurs) a récemment dévoilé son nouvel investissement majeur, une imprimante Kyocera Nixka Inkjet Systems (KNIS) Belharra, dont c’est la première installation dans le monde. Depuis Saint-Egrève dans l’agglomération grenobloise, Laurent Boidi, le dirigeant de Photoweb, nous explique l’importance de ce nouvel outil de production afin de définir un modèle plus engagé et durable dans le monde de la photo.

    Nous sommes en quête de décarbonation, car le tirage photo, produit historique de Photoweb, se trouvait en première place de nos émissions carbones en 2021, avec 29 % du total à lui seul. Il fallait trouver une solution. Il y a trois ans, nous avons découvert une PME qui travaillait sur un prototype pour réaliser des tirages imprimés de qualité, tout en étant ultra productif et respectueux de l’environnement. Il n’y avait pas encore vraiment de machine, que des bancs de tests, mais c’était prometteur.

    On a commencé à collaborer avec des engagements forts de part et d’autre : nous, en tant qu’experts de la photo, et eux, en tant qu’experts de l’impression et la conception de machines. Il s’agissait de mettre en commun nos savoir-faire afin de tenter de créer la fameuse machine qui répondrait à nos besoins. Après quelques mois, l’entreprise a été rachetée par Kyocera, ce qui nous a rassuré sur la viabilité du projet. Et aujourd’hui, la Belharra est là…

    Mon ambition, c’était qu’on propose un produit avec moins d’impact carbone.Nous y sommes, car il devrait être divisé par 3 grâce à notre nouvelle machine.  Mais l’enjeu était aussi d’être moins cher que les produits historiques, afin d’encourager une large adoption. Le pari est également réussi, car nous gagnons même quelques centimes d’euros par photo.

    Nous avons réalisé de nombreux focus groups avant de lancer notre offre autour de la machine. Tous les participants étaient bluffés par la qualité du rendu, en termes de détails, de finesse et de couleurs.Ils prenaient à chaque fois les sorties numériques pour de l’argentique. Depuis, nous avons lancé plusieurs commandes réelles, mais il est encore un peu tôt pour obtenir des retours précis, car on attend 15 jours avant d’envoyer un questionnaire de satisfaction (NDLR : l’entretien a été réalisé le 16 mai). Mais s’ils n’étaient pas satisfaits, ils nous auraient déjà appelés en ce sens. Ce n’est pas le cas, donc tout va bien.

    Il faut savoir que nous sommes transparents sur l’usage de l’impression numérique. Sur notre site, on scinde clairement les deux produits, entre d’une part impression numérique et d’autre part tirage argentique. Le client sait clairement ce qu’il achète. C’est très important, en particulier auprès de nos clients photographes professionnels. Certains sont attachés à l’argentique. On ne veut pas tout bousculer, mais on espère qu’ils essaieront, incités notamment par les prix. Pour les particuliers, c’est pareil. D’autant plus qu’il n’existe pas un grand risque pour eux, car notre politique chez Photoweb, c’est satisfait ou remboursé.

    Bien imprimer en jet d’encre, c’est facile. En revanche, la productivité n’est pas toujours au rendez-vous. Or la solution développée avec KNIS nous offre une productivité identique à l’argentique, soit 50 mètres à la minute. Le tout avec une qualité exceptionnelle. Qu’il s’agisse d’impression de photos mates ou brillantes, aucune retouche n’est nécessaire. Une fois que les photos sortent de la machine, le produit est fini. On gagne beaucoup de temps. Pour résumer, avoir investi dans la Belharra nous offre productivité, qualité, responsabilité, simplicité d’exécution, et prix bas. Elle coche beaucoup de cases.

    Non, car aujourd’hui, nous positionnons l’argentique comme une offre premium. Dans l’inconscient collectif, ce type de tirage est considéré comme plus qualitatif, donc on joue là-dessus. Mais pour être très honnête, je nous vois dans une phase transitionnelle, qui devrait s’étendre sur 3 ou 4 ans. A date, il faut reconnaître que nous sommes contraints par les formats possibles en impression numérique. La laize est obligatoirement de 10 cm, donc nous proposons du 10×15, 10×10, ou 10×13. Quand nous aurons à notre disposition d’autres laizes, et on y travaille déjà, je pense que l’argentique aura quelques difficultés à résister sur la durée.

    Premièrement, malgré l’investissement très lourd pour l’entreprise et le temps passé, je n’ai pas souhaité d’exclusivité sur la Belharra, ni de brevet sur les parties de la machine que nous avons développées. Pourquoi ? Pour que le marché se transforme dans sa globalité et que ce ne soit pas uniquement Photoweb qui ait un impact.Si on souhaite que l’industrie de la photo se décarbone vraiment, il faut que nos concurrents adoptent la même machine. Notre responsable RSE a fait un calcul : si 100 % du marché européen, soit environ 4 milliards de tirages par an, faisait usage de la Belharra, on économiserait 150 000 tonnes de CO2. C’est énorme !

    Deuxième chose, nous ouvrons nos portes à des confrères ou des concurrents pour qu’ils puissent voir la machine en action. Il n’y en a qu’une seule dans le monde, donc nous recevons des demandes de japonais, de canadiens et d’américains, qui viendront dans la banlieue de Grenoble, dans une ETI française, pour découvrir cette machine. En école de commerce, dans les années 1990, on nous apprenait que les avantages concurrentiels, on les garde et on les exploite. Mais la Convention des Entreprises pour le Climat m’a ouvert les yeux sur l’intérêt d’être en coopétition si on veut transformer les choses. En restant à un niveau entreprise, on a peu d’impact. Et la bataille, on peut la mener sur la créativité, le made in France, ou en conservant notre avance de savoir-faire dans l’exploitation de la machine.  

    Bertrand Clermont-Genevi est rédacteur en chef d'IC. Il possède dix ans d’expérience dans les médias (L’Express, 20 Minutes, Prisma Média) et en agence de communication (Hopscotch).